Discours prononcé au Moussallah (Eid gah) à l’occasion de l’ Eidoul Adha 1429 / 2008
Dans la vie des nations, il y a des jours marquants de l’année où les gens se regroupent et les pensées se concentrent autour d’un fait spirituel qui les unit. Ce sont les jours de Eid.
Le Eid oul adha vient juste après la descente des pèlerins du mont Arafat qui est le point culminant et le devoir primordial du pèlerinage.
Cette foule immense, poussée par la ferveur de la foi, ivre de cette joie indicible que l’on ressent dans l’accomplissement sincère de tout acte religieux, se presse et se bouscule pour ne pas manquer un seul rite de cette obligation sacrée, faisant fi de la fatigue, du manque total de confort et parfois même du manque d’eau et de sommeil.
Le reste du monde musulman les suit de loin par la pensée, soit qu’il ait un parent ou un ami parmi eux, soit qu’ils soient brûlés par le désir d’être un jour de leur nombre.
Et cette mobilisation de volonté, cette effervescence des cœurs sont clôturées par le jour d’eid.
En ce jour, le nom d’un homme extraordinaire résonne dans l’esprit de chaque musulman. Un seul homme à la source de ce phénomène mondial sans précédent dans l’histoire de l’humanité tant pas la ferveur qu’il génère que par l’esprit d’unité qu’il suscite, l’appartenance à une seule oummah : « Suis le culte d’Abraham, ce pur monothéiste qui ne s’est jamais compromis avec les païens » ( An nahl 123). C’est Ibrahim (as)
Un regard rapide sur la vie de Ibrahim (as) révèle trois occasions de courage, de sacrifice et d’engagement exemplaire. Ces trois occasions ne sont pas simplement des histoires à raconter à nos enfants, mais ce sont surtout des leçons de guidée pour une oummah forte de plus d’un milliard d’individus faisant face à d’immenses difficultés. Une oumma dont les mères en Irak attendent silencieusement dans les hôpitaux espérant que leurs enfants seront guéris sans médicaments, une oummah dont les filles dans les vallées du cachemire pleurent dans le silence après avoir été violées à maintes reprises, une oummah dont les pères en Palestine, condamnés dans des camps, tels des réfugiés, tiennent toujours entre leurs mains la clé de leur maison, espérant qu’un jour ils retourneront dans leur demeure. On doit transcender la commémoration coutumière du sacrifice d’Ibrahim (as) et d’Ismail (as) et se focaliser sur les leçons qu’ils nous ont laissées.
Voyons la première occasion de courage:
-Ibrahim (as) est né là où se trouve aujourd’hui l’Irak. Il a vécu dans une société où les jeux du hasard, les addictions, l’oppression et le shirk était la norme sociale. Son message a défié l’immoralité, la tyrannie et l’esclavage des peuples. Il fut l’objet de torture, d’abus et de bannissement. Il devint un étranger dans sa propre maison, un réfugié dans son propre pays et un dissident parmi l’élite religieuse. Nemroud le jeta dans le feu qu’Allah transforma en un jardin d’Eden.
Le Prophète sallallahou alaihi wasallam a dit : « L’islam commença de façon étrange et il redeviendra à nouveau étrange, alors bonne nouvelle aux étrangers »
L’Islam est apparu dans un environnement de shirk, de superstition, de violence, d’immoralité et d’oppression. Les enseignements de l’Islam étaient perçus comme incompatibles et bizarres dans le contexte social, politique et économique de l’époque. Ceux qui embrassaient les enseignements de l’Islam étaient considérés comme des étrangers et devaient payer une lourde tribu pour maintenir leur identité et préserver leur foi.
Le Prophète sallallahou alaihi wasallam avait prophétisé que l’Islam et le monde musulman sera à nouveau soumis au même traitement. Les musulmans seront traités comme des étrangers dans un contexte où les valeurs ne cessent de changer. Mais pourtant, l’Islam demeure pour toujours une religion universelle. Mais lorsque la société est corrompue, elle ne perçoit plus les vraies valeurs.
Aujourd’hui les musulmans doivent faire face aux mêmes défis qu’Ibrahim (as). Nous devons montrer beaucoup de courage, de bravoure et de fermeté fasse à l’ostracisme, la victimisation, l’hostilité, la diabolisation de l’islam. Déjà 60 % des réfugiés dans le monde sont des musulmans. Sommes-nous prêts à suivre la sounnah des ambiyah et lutter avec force et fermeté contre ces atteintes à notre foi et à l’image de l’islam, même si cela devrait correspondre à tenir du charbon ardent dans notre main, comme le précise un hadice de notre Prophète sallallahou alaihi wasallam. L’engagement à l’égard de notre imane entraîne avec lui des tests, des difficultés et des épreuves : « L’homme pense-t-il que nous allons le laisser professer la foi et nous ne l’éprouverons point ? » (Al Qouraane).
-La deuxième occasion de bravoure est lorsqu’Ibrahim (as) fut ordonné de quitter son pays natal et de migrer vers la Palestine. Sa femme Hajra (as) donna naissance au prophète Ismail (as) Quand il fut âgé seulement de quelques mois, Allah ordonna ensuite au prophète Ibrahim (as) d’emmener sa femme Hajra et le prophète Ismail (as) dans la vallée de Bakkah. Et commença ainsi un long est difficile voyage. Ils arrivèrent finalement dans la vallée complètement désertique sans arbre ni eau. Ils installèrent leur tente et regardèrent autour d’eux. Il n’y avait rien d’autres que du sable. Dans cet état de solitude extrême, Ibrahim (as) laissa sa famille et commença à s’éloigner. Hajra (as) lui demanda : « Oh Ibrahim ! Tu vas nous laisser dans ce désert où il n’y a personne ni moyens pour survivre ? ». Elle répéta plusieurs fois sa question qui resta sans réponse. C’est alors qu’elle demanda. Et mes chers frères c’est dans de tels moments de difficultés que le vrai visage de notre imane se dévoile. Elle dit : « Est-ce Allah qui t’a ordonné cela ? ». Ibrahim (as) fit un signe affirmatif. Et regardez la réponse étonnante de Hajra (as), digne des plus grandes femmes de l’histoire de l’humanité. C’est d’ailleurs sa descendance qui donnera naissance au Prophète sallallahou alaihi wasallam: « Alors Allah ne nous laissera pas périr. » Il n’y a pas eu de cris de discrimination ni de questions de démocratie ou d’égalité de sexe. Il n’y a pas eu de « si » ni de « mais ». Il n’y a pas eu de : « Je ne comprends pas cela » ou « cela n’a pas de sens ». Il n’y avait qu’une seule chose : c’est l’ordre d’Allah et je m’y soumets totalement.
Notre défi aujourd’hui est de développer la même conviction en Allah que celle de Hajrah. C’est Allah le seul Haafiz (Protecteur). C’est Allah le seul Raaziq (Pourvoyeur). On doit développer une telle relation avec Allah, un tel état d’esprit dans nos maisons, pour que nos femmes et enfants comprennent le vrai sens de la vie et seraient prêts à sacrifier leur vie pour le plaisir d’Allah. Raçouloullah sallallahou alaihi wasallam a dit en ce sens: « Lorsqu’un homme obéit à sa femme et se rebelle contre sa mère, lorsqu’une personne se rapprochera de ses amis et s’éloignera de son père, alors attendez la tempête de sable rouge, les tremblements de terre, le naufrage des gens, et le défigurement des hommes. »
L’échec de la famille entrainera l’échec de la moralité de la société, qui en retour provoquera les grands signes du quiyamah.
Le Eid oul adha demande donc que nous réexaminions notre foi en Allah, que nous remettions en cause notre conduite en tant que père et époux.
Est-ce qu’une orientation islamique s’installe dans ma maison ou est-ce l’Islam qui est banni de ma demeure. Est-ce que nous jouissons de la loyauté et de la confiance de nos épouses et de nos enfants ?
Sommes-nous prêt à lutter contre les difficultés matérielles et l’isolation dans notre quête du plaisir divin ?
-La troisième occasion d’épreuve, et certainement la plus difficile, est l’ordre d’Allah de sacrifier son fils de 12 ans. Considérez cet ordre d’Allah à sa véritable valeur et voyez comment elle est totalement illogique. Aurait-il s’agit d’un penseur illuminé de notre époque moderne qu’il aurait certainement demandé : « Mais quel mal mon fils a-t-il fait ? Comment puis-je égorger un enfant innocent ? »
Ou peut-être aurait-il juste surpassé cet ordre et réinterpréter cette obligation. Mais c’était Khaliloullah, Ibrahim (as). Il accepta immédiatement, sans broncher, cet ordre d’Allah. Et son fils l’a suivi entièrement dans sa réponse sans se poser de question : « Oh mon Bien Aimé père, fais ce qui t’est ordonné. Tu verras, s’il plaît à Dieu, que je suis de ceux qui savent s’armer de patience dans l’épreuve ». (37,102).
Le qourbani est la démonstration et la preuve de notre soumission totale à l’ordre d’Allah sans la recherche futile d’un raisonnement logique derrière cet ordre. Notre obéissance à Allah ne dépend pas de la déduction logique derrière un ordre au travers de notre compréhension limitée. Nous savons qu’Allah est le plus Grand Connaisseur et le plus Sage. Et notre propre capacité de raisonnement ne peut pas atteindre la connaissance et la sagesse qui se cache derrière les commandements divins.
C’est exactement ce qu’Ibrahim (as) a fait : « Quand Dieu lui dit : soumets toi ! Il répondit : je me soumets totalement au Seigneur des mondes » (Al Qouraane). Apparemment il n’y avait aucune raison pour qu’un père égorge son fils. Mais quand l’ordre d’Allah est là, il n’y a pas eu de questions, ni une seconde d’hésitation. Même lorsqu’Ibrahim (as) demanda à Ismail (as) son avis sur le rêve qu’il avait fait, il n’a pas posé de questions sur la légitimité de l’ordre d’Allah, ni n’a-t-il soupiré, ne s’est-t-il lamenté, ni n’a-t-il cherché à savoir la raison de son sacrifice. La seule réponse fut : « Oh mon Bien Aimé père, fais ce qui t’est ordonné. Tu verras, s’il plaît à Dieu, que je suis de ceux qui savent s’armer de patience dans l’épreuve ». (37,102).
Le qourbani doit être offert avec la recherche du même idéal et la même attitude de soumission.
Le qourbani n’est pas un spectacle à sensation, une exhibition où la star est le plus bel animal, un festival d’animaux qui sont photographiés et filmés. Si on a réduit le qourbani à cela, alors on a rien compris à la signification du qourbani.
Quand on mettra l’animal par terre, que celui qui sacrifie ou celui qui observe se pose la question suivante : quel est le sens de ce qu’on est entrain de faire ?
La réponse est simple : « équipe bat à ter, et imane en l’air…. »
L’animal qu’on sacrifie est le symbole de notre nafs, notre égo, les basses impulsions qui se trouve en chacun de nous, et qui nous tire vers le plaisir immédiat et égoïste. Ce nafs qui est l’ambassadeur de Shaytane contre notre âme.
En résumé, le qourbani nous demande donc trois choses :
- Que nous soyons prêts à être consommé par le feu de nemroud.
- Que nous nous consacrions pour le tarbiyyah (l’éduction spirituel) de nos épouses et de nos enfants.
- Que nous placions le couteau sur le coup de nos désirs en égorgeant l’animal.
Qu’Allah accepte nos sacrifices et qu’il nous accorde la foi, l’amour et l’obéissance pour suivre l’exemple d’Ibrahim (as).
Wa aakhirou da’waana ‘anil hamdoulillahi rabbil ‘alamine.
Al ISLAM N° 193
Louqman A.S. Ingar.